Page:Gorki - Ma Vie d’enfant.djvu/107

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— Contre les poux, madame, il faut se laver souvent et prendre des bains de vapeur de menthe. Si les poux sont sous la peau, mélanger une cuiller à soupe de graisse d’oie tout à fait pure, une cuiller à thé de sublimé et trois grosses gouttes de mercure, brassez-le sept fois dans une soucoupe avec un tesson de faïence et frottez-vous avec cette pommade. Surtout n’allez pas employer une cuiller de bois ou d’ivoire, car le mercure serait perdu, et ne prenez ni cuivre ni argent : c’est dangereux !…

Parfois, elle conseillait d’un air pensif :

— Vous, ma chère, vous feriez mieux d’aller au couvent trouver Azafe, le moine austère ; je ne puis pas vous répondre !

Elle servait de sage-femme, débrouillait les histoires de famille, résolvait les conflits, soignait les enfants ; récitait par cœur le Rêve de la Vierge qui porte bonheur, afin que les femmes l’apprissent, et donnait des conseils culinaires.

Toute la journée, je restais près d’elle, au jardin ou dans la cour ; d’autres fois nous allions chez les voisines où, pendant des heures entières, elle prenait le thé en racontant d’interminables histoires, et de cette époque de ma vie je ne revois que cette vieille femme toujours bonne et si remuante.

Parfois, ma mère, venant je ne sais d’où, faisait une apparition ; mais elle ne restait pas longtemps. Fière et sévère, elle regardait choses et gens avec des yeux froids comme un soleil d’hiver et disparaissait bientôt sans laisser derrière elle le moindre souvenir.

Un beau jour, je demandai à grand’mère :