lit et prononça des paroles que je n’ai jamais oubliées depuis :
— Écoute, mon enfant : rappelle-toi que tu ne dois jamais te mêler des affaires des grandes personnes ! Les grandes personnes sont méchantes. Agis donc selon ton cœur d’enfant. Attends que le Seigneur t’indique ta mission et te montre ton sentier. As-tu compris ? Quant aux fautes des autres, ce n’est pas ton affaire. C’est à Dieu à juger et à punir. C’est à lui et non à nous !
Elle se tut ; puis, après avoir prisé, elle ajouta, clignant de l’œil :
— Et je t’assure que souvent Dieu lui-même n’est pas capable de distinguer l’innocent du coupable !
— Est-ce que Dieu ne sait pas tout ? demandai-je avec étonnement. Elle me répondit, d’une voix basse et mélancolique :
— S’il savait tout, il y a bien des choses que les gens ne feraient pas. Dieu nous regarde du haut du ciel, il nous voit tous et souvent il doit s’écrier en sanglotant : « Ah ! mes enfants, mes pauvres enfants ! Que vous me faites pitié ! »
Grand’mère éclata elle-même en sanglots, et, sans essuyer ses larmes, se mit en devoir de prier.
À dater de cette heure, son Dieu me devint plus proche encore et plus accessible.
Grand-père m’enseignait que Dieu est un être tout-puissant, omniscient, omniprésent, toujours prêt à venir en aide aux hommes, mais grand-père ne priait pas comme sa femme.
Le matin, avant de réciter ses oraisons devant les icônes, il se lavait longuement, puis s’habillait avec