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choses et même nous ne le connaissons que d’une connaissance peu sure et relative. « Les choses extrêmes sont pour nous comme si elles n’étaient pas ; et nous ne sommes point à leur égard ; elles nous échappent et nous à elles. » — « Infiniment éloigné de comprendre les extrêmes, la fin des choses et leurs principes sont pour lui (pour l’homme) invinciblement cachés dans un secret impénétrable. » — Manque d’avoir contemplé ces infinis, les hommes se sont portés témérairement à la recherche de la nature, comme s’ils avaient quelque proportion avec elle. » (I. 1).

Et si l’esprit de l’homme n’a aucune proportion avec le monde sensible, considéré comme objet de connaissance, aura-t-il du moins de la proportion avec le monde duquel il relève directement, avec le monde des esprits, avec Dieu le Père des esprits, et pourra-t-il le connaître d’une connaissance certaine ? Pascal n’hésite pas à répondre : bien moins encore. « S’il y a un Dieu, dit-il, il est infiniment incompréhensible, puisque, n’ayant ni parties ni bornes, il n’a nul rapport avec nous ; nous sommes donc incapables de connaitre ni ce qu’il est, ni s’il est. Cela étant, qui osera entreprendre de résoudre cette question ? Ce n’est pas nous, qui n’avons aucun rapport à lui. » (X. 1).

« Voilà notre état véritable, conclut Pascal en dernier lieu. C’est ce qui nous rend incapables de savoir certainement, et d’ignorer absolument. » (I. 1).

Pascal ne s’arrête pas au côté purement intellectuel des questions qu’il aborde : il les considère sous tous leurs aspects, par leur côté moral surtout. C’est donc par la même cause, par ce manque de proportion entre l’homme