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fortes présomptions. Ne pas accorder ce dernier point pt vouloir mettre la religion chrétienne sur le pied des autres, même des plus parfaites, c’est manquer de droiture d’esprit ou de sincérité, et c’est rendre par conséquent impossible tout débat subséquent. (XIV. 3).

L’objet du débat sera donc désormais de montrer que la religion chrétienne fait effectivement ce qu’elle a la prétention de faire. Que Pascal réussisse à le montrer et il aura fait une apologie triomphante.

Mais on l’arrête dès l’entrée par une objection préjudicielle.

Par votre conception de la nature humaine, lui dit-on, vous vous placez en dehors des conditions de la dialectique ; vos prémisses sur la déchéance de l’homme en général, et sur l’impuissance de la raison en particulier, sont contradictoires avec votre dessein et vos conclusions ; du pied dont vous êtes parti, il vous est impossible d’arriver ; vous vous êtes engagé en plein pyrrhonisme, et le pyrrhonisme est un cul-de-sac dont on ne peut pas sortir, ou dont on ne sort que par une contradiction formelle. Aussi votre foi est-elle une inconséquence et non une croyance philosophique au sens rigoureux du mot. Votre foi, vous l’avez qualifiée vous-même, est un abêtissement. — Vous l’avez dit ironiquement ; nous avons le droit de le prendre sérieusement.

Il nous faut examiner cette objection d’un peu près.

Deux questions se posent : — Pascal est-il pyrrhonien au sens historique du mot ? — La mesure de pyrrhonisme qu’il a introduite dans son apologie, rend-elle cette apologie irrémédiablement impuissante ?

À vrai dire, la première de ces questions nous paraît tout à fait secondaire, et nous ne l’examinons que parce qu’elle