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est « incapable de vrai et de bien. » C’est là le principe dominateur de son apologie.

Ce pessimisme a été vivement attaqué, et par tous les partis à la fois. On a reproché à Pascal de n’avoir pas flatté la nature humaine ; il ne s’en défend pas, vu qu’il n’avait pas à la flatter, mais à la peindre. Il eût fallu montrer que sa peinture n’était pas fidèle. Ce n’était pas chose facile. Qu’on suive en effet l’homme dans toutes les sphères qu’il lui a fait parcourir ; qu’on l’étudie à fond dans tous ses attributs et toutes ses capacités, et l’on sera forcé de reconnaître que le tableau de Pascal est bien ressemblant. L’homme croit au progrès, à la vérité, à la justice, au bonheur et au bien ; il y croit et ne cesse de les poursuivre. En ce sens, il est optimiste, et Pascal, qui n’a pas négligé ce trait de sa mobile et changeante figure, l’est aussi bien que lui ; mais au fond, tout au fond de son âme, le pessimisme persiste et l’emporte. L’homme de Pascal nous parait bien plus vivant et bien plus vrai que celui de Voltaire. Nous allons plus loin : Nous disons que l’Évangile est plus pessimiste encore que Pascal. Cela nous paraît incontestable : un système religieux qui a à sa base une doctrine comme celle du péché originel, ne peut être que pessimiste. Il ne devient optimiste que quand il propose les conditions et les perspectives du relèvement et de la vie éternelle.

Ainsi l’idée que Pascal a mise à la base de son apologie a reçu comme une double consécration : elle est aussi bien fondée en fait dans la nature vraie, actuelle de l’homme, que consacrée théoriquement par l’enseignement évangélique. Or, c’est là, si on veut bien y réfléchir, une présomption favorable de premier ordre. A priori,