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HISTOIRE DU MOYEN-ÂGE

posé beaucoup de Bretons, avait dû les combattre et les dépouiller en partie de leurs domaines. Des seigneurs normands, le propre fils du conquérant, Robert Courteheuse (aux petites jambes), le duc de Bretagne Hoël V, sollicitèrent l’intervention de Philippe contre l’impitoyable tyrannie de Guillaume qui fut contraint de lever le siége de Dol (1084). Le Capétien s’étant moqué de l’extrême embonpoint de son vassal, Guillaume, furieux de la plaisanterie, jura de porter à Philippe les cierges des relevailles. Il marcha sur la ville de Mantes qu’il réduisit en cendres, et il se disposait à pousser plus loin ses ravages, quand il mourut à Rouen, le 10 septembre 1087, en recommandant son âme « à Madame Marie sainte Mère de Dieu, » il avait soixante-trois ans. À peine eut-il expiré que les assistants, médecins, vassaux et parasites s’enfuirent à cheval pour aller veiller sur leurs biens ; les gens de service se hâtèrent d’enlever les armes, les vases, les vêtements, jusqu’au lit funéraire, laissant nu, sur le carreau, le corps de leur maître. Le vainqueur d’Hastings ne dut qu’à la pitié de quelques clercs une tombe dans son pays natal.

Guillaume II, surnommé Rufus ou le Roux, lui succéda en Angleterre ; Robert Courteheuse, l’aîné, en Normandie ; le troisième, Henri, dit Beau-Clerc, n’eut que cinq mille livres d’argent. Guillaume et Robert travaillèrent tour à tour à s’enlever l’Angleterre et la Normandie. Robert, qui comptait des partisans à la cour même de son frère, tenta une descente dans le royaume ; mais, vaincu par Guillaume, il fut sur le point de perdre son propre apanage et ne parvint à le défendre que grâce à l’appui de Henri-Beau-Clerc et surtout du vaillant comte d’Anjou, Foulques-le-Réchin. Cette guerre civile désola tout le duché de Normandie ; les seigneurs en profitèrent pour massacrer les principaux habitants des villes où la bourgeoisie commençait à s’élever et pour s’emparer sommairement de leurs dépouilles (1091).

Quant à Guillaume-le-Roux, dur et violent, passionné pour la chasse comme son père, il traita durement ses sujets qui l’appelaient gardien des forêts et berger des