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HISTOIRE DU MOYEN-ÂGE

munificence par les écuyers, les damoiselles, les barons et les châtelaines.

Ces poëtes errants commencèrent à donner une forme littéraire aux idiomes nouveaux, encore imparfaits, rudes, variables, plus ou moins imprégnés de latin, suivant le génie ou l’ignorance des divers peuples barbares.

Ces langues vulgaires comprenaient : en Germanie, au delà de la Meuse, le tudesque, langue de ia ; en Italie, l’italien, langue de si ; dans la Gaule romaine et neustrienne, le roman, déjà divisé en roman du nord, Welche ou Wallon, langue d’oil, et en roman du midi, langue d’oc. Le roman était le produit de la langue gallo-romaine, modifiée par les Franks et dont la formation fut surtout hâtée par les Scandinaves, dès leur établissement en Normandie. Le latin, quoique fort avili, resta la langue religieuse et philosophique, tandis que les idiomes nationaux se développaient dans la société temporelle. Les interminables épopées des trouvères, appelées Chansons de geste, ayant parfois de vingt à quarante mille vers, appartenaient par leurs sujets à plusieurs cycles : Le cycle karlovingien, dont Karl-le-Grand fut le héros, et qui, plus tard, produisit la chanson de Roland et le roman des Lohérains ; le cycle armoricain, dont les héros furent le roi Arthus et les chevaliers de la Table ronde, personnages légendaires calqués sur ceux du siècle précédent et chantés par Robert Wace, un demi-siècle après, dans son roman de Brut. Alexandre-le-Grand fut le héros du troisième cycle. Dès le commencement du xie siècle se produisit donc une sorte de renaissance littéraire dont les symptômes, visibles du temps de Karl-le-Grand, s’étaient effacés sous ses successeurs. Cependant, sous l’empereur Karl-le-Chauve, subsistait encore une certaine activité intellectuelle, qui s’affirma dans l’école du palais et surtout dans les disputes théologiques. Vers 850, le bénédictin Gotescalc, disciple rigoureux de saint Paul et de saint Augustin, avait provoqué d’ardentes controverses en soutenant le dogme de la prédestination. Condamné par deux conciles, même publiquement, puis emprisonné par Hinkmar dans un