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QUATORZIÈME SIÈCLE

reçut de nouveau l’hommage de vassalité du roi Grenadin, à qui il accorda une trève de dix ans, sous condition d’un tribut annuel de douze mille doblas d’or (1343).

Youzef profita de la paix pour améliorer les lois et l’administration de son royaume, augmenter ou embellir les monuments publics et multiplier les écoles, dont il rendit l’enseignement uniforme. Les intrigues sanglantes qui ébranlaient le trône islamite d’Afrique poussèrent Alphonse XI à rompre la trêve convenue, pour attaquer Gibraltar (1349). Il mourut de la peste au siége de cette place ; et, quatre ans après, Youzef, assassiné par un fou, laissait le pouvoir à son fils, Muhamad V. Un usurpateur, Abou-Saïd, le chassa de l’Alhambrâ et du trône, et tous deux réclamèrent l’appui de leur suzerain, le nouveau roi de Castille, Pierre Ier, surnommé le Cruel par les nobles et le Justicier par le peuple. Abou-Saïd ayant eu l’imprudence de se présenter à Séville, couvert de pierreries et suivi d’un cortège magnifique, le roi l’accueillit pompeusement à l’Alcazar, et, au milieu de la nuit, le fit arrêter avec tous les siens. Cette perfidie lui livra toutes les richesses de ses hôtes, qui furent égorgés le lendemain (1362). La mort de l’usurpateur rendit à Muhamad la possession de Grenade.

Pierre le Cruel, aigri par les trahisons, croyait trouver la justification de toutes ses férocités dans les dangers que lui créaient ses grands vassaux, poussés à la révolte par leur propre ambition ou par les intrigues de Pierre IV d’Aragon. Celui-ci, qui avait déjà dépouillé le roi de Majorque, nourrissait le dessein de joindre une partie de la Castille à ses États de Barcelone, de Valence et d’Aragon. Il s’était fait le protecteur de Henri de Transtamare, fils naturel d’Alphonse XI, qui ne cessait de fomenter des révoltes dans le royaume de son frère. L’aristocratie, moins féodale en Castille qu’en Aragon, se prêtait volontiers à la rébellion, dans le but d’accroître ses prérogatives. En Castille les riches-hommes (ricos hombres), grands seigneurs terriens, entraînaient facilement les simples chevaliers nobles,