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Page:Goudeau — Dix ans de bohème, 1888.djvu/17

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intimement lié, dans la mémoire des perroquets qui y dormirent, à une indéfinissable senteur de champignons vagues et d’invraisemblables truffes : champignons spectres ! truffes fantômes ! pourriture certaine ! Périgourdins que nous étions, cela ne nous étonnait pas autrement : ainsi fleurent les bois de chez nous, durant les automnes mouillés.

L’administration française m’apparut sous un aspect au moins singulier. Le chef de bureau qui m’accueillit, me demanda :

— Avez-vous déjà été employé ?

— Non, répondis-je avec sincérité, puisque je suis surnuméraire.

— C’est dommage, fit le chef d’un air profond. Enfin, nous allons vous chercher du travail.

Il appela un commis principal, et lui donna quelques instructions. Ce commis m’entraîna dans un bureau, très peuplé de rédacteurs et d’expéditionnaires. Là, il me fit asseoir devant un pupitre, plaça deux gros registres sous mes yeux, un crayon rouge dans ma main, et me dit, sans rire :

— Ce registre de chiffres a été pointé déjà au crayon noir, au crayon bleu, au crayon vert, au crayon jaune ; il s’agit de savoir si les nom-