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Page:Goudeau - Poèmes ironiques, 1900.djvu/12

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« Ô mon père Apollon, que vous ai-je donc fait ?
« Moi, le Rayon lunaire, albe comme le lait,
« Moi, la flèche d’Azur et d’Or, moi, la Lumière !
« Moi, votre enfant la plus aimée et la première !
« Ô mon père Apollon, quel crime ai-je commis,
« Pour être ainsi livrée aux hommes ennemis ?
« Autrefois — il y a bien longtemps ! — dans l’espace
« J’habitais le Soleil et l’Étoile qui trace
« L’étincelant sillon dans le Chaos lointain ;
« J’étais le messager de l’éternel Matin,
« Le germe qui rendait les planètes fécondes,
« L’aiguille du Destin qui reliait les mondes.
« J’étais Tout, la matière inerte ayant en moi
« Trouvé le Mouvement et la Forme : sa Loi.

« Puis, un jour, votre main jusqu’alors tutélaire
« Appesantit sur moi le poids de sa colère,
« Et me jeta, du clair des Cieux chez les Humains,
« Aux veines des cailloux errants sur les chemins.
« Encore là j’avais l’air vibrant des campagnes,
« J’allumais les foyers des pâtres des montagnes ;
« Plein de vieilles chansons, l’Océan me roulait,
« Comme un berceur, dans ma nacelle de galet ;
« Puis, quand tu m’enfermas dans la blancheur des cires
« Me résignant, je dis : Fais comme tu désires !