Page:Gouges - L Homme genereux.pdf/33

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[à part].

Parlons-lui d’abord de ſon frere, pour l’entretenir enſuite ſur le compte de Marianne.

Madame de Valmont.

Je ſuis ſortie de bonne-heure ce matin ; mais dites-moi de qui il s’agit ; je viens d’apprendre que mon frere eſt parti pour ſa terre.

Le Comte, à part.

Il m’en a fait un miſtere, & après ſon départ, j’ai reçu de lui un billet, dont les expreſſions ſont auſſi froides que vagues.

[haut].

Mais croyez-vous, Madame, que ce la Fontaine ſoit un homme auſſi abominable qu’on vous l’a peint ?

Madame de Valmont.

Ah ! je ſuis bien sûre qu’il eſt encore plus odieux que tout ce qu’on en peut dire. Mon frere eſt un ingrat, & je ne puis, malgré ſes torts à mon égard, m’empêcher de l’aimer. Je vois avec douleur, ou plutôt je l’apprends, qu’il ſe conduit de la maniere la plus indécente avec ſa famille, & notamment avec ſa mere, qu’il a cependant le plus fort intérêt à ménager, ſa plus grande fortune venant de ſon côté. Cette ame dévote pourroit fort bien ſe croire obligée en conſcience de déshériter un fils qui ſemble prendre plaiſir à ſe jouer de ſes ſages remontrances. Il n’y auroit qu’un ſeul moyen pour ramener mon frere à lui-même ; ce ſeroit de lui trouver une compagne aimable qui ſçût le fixer, une digne épouſe qui le forçât à renoncer à ſon vil agent.