Page:Gouges - L Homme genereux.pdf/38

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travaux mercenaires ; ſa converſation eſt bien la pure image de la candeur, de la ſageſſe & de la piété filiale, & je vous avoue que ſa rare vertu m’édifie autant qu’elle m’enchante. Cette fille reſpectable ſembre vouloir ſe dérober aux avantages qu’elle trouveroit dans le monde ; voilà tout ce que je ſais de cet aimable enfant… Mais vous m’y faites penſer ; je lui ai promis de l’aller voir ; comme j’ai affaire dans ce quartier là, j’y vais de ce pas.

Le Comte, ſe regardant.

Si j’étois en état de vous donner la main, je vous accompagnerois.

Madame de Valmont.

Mais je le croirois ſans peine ; je ſuis loin cependant de ſoupçonner votre façon de penſer.

Le Comte.

Je ne m’en défends pas. Cette adorable fille m’occupe ſans ceſſe, & le tableau touchant que vous en faites acheve de m’intéreſſer à ſon ſort : non que j’éprouve des deſirs qui puiſſent allarmer ſa vertu ; vous ne m’en croyez pas capable : mais ſi, ſans être connu, je puis adoucir ſon infortune, c’eſt vous que je chargerai de mes bienfaits ; ce ſont là mes vûes, & je n’en ai pas d’autres.

Madame de Valmont.

Ah, j’en ſuis bien perſuadée. Je vous reconnois à ces nobles procédés. Que nos gens de bien ſont loin de cette généroſité ! Encourager la vertu, c’eſt le ſoin le plus digne d’un honnête homme. Adieu, je vais m’acquitter du reſpectable devoir que vous m’impoſez.

[Le Comte donne la main à Madame de Valmont, qui va pour ſortir ; ils s’arrêtent en voyant entrer Germeuil.]