Page:Gouges - Oeuvres de madame de Gouges - 1786.pdf/173

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Un but cependant plus louable à vos yeux, fut celui de démasquer les méchans qu’un sort malheureux me fit rencontrer sur mes pas. Molière, par son Tartuffe, comme je l’ai dejà dit dans mon homme généreux, sembloit avoir étouffé ces hommes pervers, qui se reproduisent parmi nous ; mais le vice est toujours le même ; il n’a fait que changer de forme. Aujourd’hui sous un air de candeur & de vérité, un fourbe, un imposteur, trompe, abuse le Public, & l’amuse même s’il a de l’esprit. Il est difficile de rendre ces caractères. Molière lui-même avec son génie créateur seroit embarrassé de les peindre. Un Caffard, un Hypocrite est plus aisé à traiter qu’un esprit ouvert & naïf ; cependant ces deux genres d’hommes ont les mêmes vices, & il n’appartiendroit donc qu’à cet Auteur immortel, s’il pouvoit ressusciter, de traiter ce nouveau genre d’hypocrite. J’ai ôsé l’essayer, sans ôser mettre rien du mien ; tel que je l’ai trouvé dans la Société, tel je l’ai rendu. Cette foible esquisse ne m’a pas moins attiré, comme ce grand homme, la calomnie des méchans. On me fait passer dans le monde pour une femme dangereuse qui ne pardonne rien à personne, & qui met tout l’Univers en Comédie. J’avoue donc au Public que ce grand Univers, sur lequel j’exerce mes foibles talens, pour-