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Page:Gouges - Zamore et Mirza - 1788.djvu/8

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affreux de l’autorité qui me commandoit ton ſupplice.

Mirza.

Il falloit me laiſſer mourir, tu ferois auprès, de notre Gouverneur, qui te chérit comme ſon enfant. J’ai cauſé tes malheurs & les ſiens.

Zamore.

Que me dis-tu ? Toi périr ? Eh ! pourquoi me rappeller encore les vertus & les bontés de ce reſpectable maître ? J’ai fait mon devoir auprès de lui ; j’ai payé ſes bienfaits d’une tendreſſe filiale. Il me croit coupable, & voilà ce qui rend mon tourment plus affreux. Il ne ſait point quel monſtre il avoit honoré de ſa confiance : j’en ai purgé la terre, & j’ai ſauvé mes ſemblables de ſa tyrannie. Mais, ma chère Mirza, perdons un ſouvenir trop cher & trop funeſte ; nous n’avons plus d’autres protecteurs que la nature. Mère bienfaiſante ! Tu connois notre innocente ; non : tu ne nous abandonneras pas, & ces lieux déſerts nous cacheront à tous les yeux.

Mirza

Je prends plaiſir à t’entendre. Tu m’as appris tout ce que je ſais ; mais, dis-moi, Zamore, pourquoi les Européens & lee Habitans ont-ils tant d’avantages ſur nous pauvres Eſclaves ? Ils ſont cependant faits comme toi & moi. Pourquoi ont-ils tant de ſupériorité ſur nous ? Nous ſommes des hommes comme eux. Eh ! pourquoi une ſi grande différence de leur eſpèce à la nôtre ?