Page:Gounod - Mémoires d’un artiste, 1896, 3e éd.djvu/271

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

autres, et séparés depuis si longtemps ! Plus de foyer, l’éloignement des siens, l’absence et la dispersion des amis, l’angoisse de tout instant sur le sort, la santé, la vie de ceux qu’on aime, des existences fauchées par milliers, des carrières anéanties, suspendues ou entravées, des familles ruinées, des provinces ravagées, et au bout de tout cela une solution encore inconnue : voilà le bilan et le testament de l’année qui va mourir après avoir englouti tant de victimes et répandu tant de désastres ! Voilà le résultat actuel du Progrès humain. Si c’est aux fruits qu’on juge l’arbre, et si, comme cela est incontestable, la valeur des causes doit se mesurer à celle des effets, il faut reconnaître que, pour en arriver où nous sommes, la sagesse humaine a dû faire bien fausse route, et que cette raison, de l’émancipation de laquelle nous sommes si jaloux, n’a pas de quoi se montrer bien