Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/107

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cabinet de toilette elle avait vu la scène et maintenant, assise à terre, la tête mourante de son chien sur les genoux, elle laissait couler des larmes très cuisantes, très douloureuses sur les poils durs de son cher compagnon.

« Cette petite est absolument ridicule, exclama Edvig. En vérité, Hans, je ne puis vous comprendre ; finissez-en donc avec cette mise en scène et emmenez votre femme. »

Le comte sortit, déjà considérablement énervé, il eut une brusquerie hors de propos, prenant Michelle par la main, il l’obligea à se relever…

« Montez chez vous, Madame, ces puérilités ne sont plus de mise. »

Michelle leva sur lui des yeux surpris et mettant à pleines lèvres, avec une indicible émotion, un dernier baiser sur le museau de son chien, elle obéit passivement sans un mot.

Rentrée dans l’appartement assigné par la servante, elle sanglota à perdre haleine, si bien que la cloche du dîner tinta deux fois sans qu’elle en perçût le son. Sa femme de chambre vint l’avertir qu’on l’attendait à table.

« Priez, M. le comte, dit-elle, de m’excuser, je ne puis réellement descendre ce soir. Je n’ai besoin de rien. »

Nul ne revint vers elle ; le frère et la sœur dînèrent en tête-à-tête.

Hans exprima le vœu d’envoyer un plateau chargé de quelques aliments à sa femme ; mais Edvig intervint.

« Du tout ! vous allez, par vos gâteries, rendre ma belle-sœur insupportable, il ne faut pas accepter ainsi tous ses caprices. Nous sommes seuls à table, rien ne l’empêche de se joindre à nous, si elle a faim. *

Le comte se tut, sans aucun appétit, sans