Ainsi fut fait ; l’enfant fut donné à une nourrice allemande. Sous prétexte de surveiller cette nourrice, ce dont l’inexpérience de Michelle était incapable, la sœur du comte installa le bébé dans ses appartements situés dans l’aile opposée au château.
Le comte laissa faire, toujours faible, et ce fut pour lui une attirance de plus vers le logement de sa sœur.
Quant à Michelle, désolée, déçue, elle se réfugia aux pieds de la Croix, suppliant le Seigneur de lui accorder vite un autre enfant, une fille, qu’enfin peut-être on lui laisserait. Pour l’instant, elle n’avait pas souci de l’âme de son fils ; il avait été baptisé à l’instant même de sa naissance par le docteur lui-même, parce qu’on avait craint un moment pour sa vie, et l’intention de ce médecin, qui était catholique, avait été tout simplement de donner au petit nouveau-né un passe-port pour le ciel. Jusqu’à ce que Wilhem eût l’âge de raison, Michelle n’avait donc rien à redouter, elle saurait bien faire joindre les menottes du bébé devant les images de Jésus et de Marie, elle saurait bien lui apprendre à préférer le culte extérieur de nos églises, à la froideur glacée des temples. Tous les dimanches elle se rendait en voiture à la cathédrale de Fribourg, distante de quelques kilomètres ; souvent son mari l’accompagnait dans cette ville, capitale du duché de Bade où mille affaires ou relations l’appelaient sans cesse. Quelque-