— Alors, je vais lui écrire.
— Surtout, hâte-toi. Tiens, j’ai mon plan ; vois, je suis au lit, mais habillé, nous allons descendre par la fenêtre de la pharmacie qui est déserte à cette heure et donne sur le parc. Nous serons cachés par les massifs.
— Il y a des rondes et des chiens.
— Les chiens te connaissent ; les rondes, nous les éviterons. Tu perds un temps précieux, Minihic ; si tu me laisses aller seul — et j’irai, — tu seras responsable de la mort d’un Français, si je suis repris. Allons, écris vite, mets ce croquis des enfants de ta maîtresse avec ta lettre, ce sera mon adieu à moi. Va et que Dieu nous garde ! »
Le Breton écrivit quelques mots rapides, il y enjoignit son petit sac de terre de France, le portrait de Wilhem et d’Heinrich et il glissa le tout dans le bureau de la comtesse Michelle, à côté de ses ordonnances de médecin et de ses rapports de santé ; puis, un peu grisé, un peu tremblant, il roula son tablier d’infirmier, saisit son chapeau, sa bourse, son couteau, suspendit sa livrée au-dessus de son lit et revint vers son compatriote.
Georges s’était déjà glissé dans la pharmacie ; doucement, il avait fait jouer l’espagnolette de la fenêtre, qu’aucun barreau de fer n’entravait, Rantzein étant créé pour être une demeure de plaisance et non une prison. D’épais lauriers montaient jusqu’à l’appui de la croisée, où ils étaient taillés en bordure.
« Allons saute, dit Georges Rozel à Minihic, nous ne sommes qu’au premier étage, en te pendant par les mains au bord de la fenêtre, tu auras moins de distance à franchir, d’ailleurs, tu tomberas sur la terre molle ; va, je te suis.
— Et la sentinelle qui se promène dans l’allée ?
— Elle tourne le dos pour le moment, saute avant qu’elle ne se retourne. »
Les deux jeunes gens, lestes et hardis, franchirent d’un élan ce premier obstacle ; un chien grogna, tout de suite calmé par un léger sifflement du groom. La lune, sous