Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/250

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Hans était superbe dans son grand uniforme ; le front balafré, une couronne de gloire ainsi que le disait Edvig emphatiquement ; il était à peine grisonnant. Parvenu au faîte des grandeurs, ses fils auraient un bel avenir, un joli chemin, semé de lauriers. La montée pénible serait épargnée à ces jeunes vies par le travail paternel. L’empereur estimait infiniment le général. Il lui confiait ses plans, ses rêves, et l’entretenait chaque jour des affaires de l’État. Toute besogne de confiance était le lot du général Hartfield. Il pouvait donc sourire et passer fièrement. Cependant, une ombre voilait son regard : jamais il n’amènerait sa femme à aimer sa patrie ; jamais il ne conquerrait ce cœur français. Lui aussi avait remarqué les fleurs arborées par Michelle, et s’il n’avait pas arraché ce bouquet d’un geste de colère, c’est que, depuis cinq ans, Hans étudiait l’art de vaincre ses passions, ses violences, et il y parvenait, lentement, d’autant plus lentement, qu’Edvig ne désarmait jamais vis-à-vis de Michelle. Aigrie, vindicative, elle ne s’accoutumait pas à la présence de l’étrangère dans la maison. Depuis la guerre, sa jalousie avait encore grandi ; elle harcelait son frère, le lui représentant, en toute occasion, les moindres actes de Michelle comme ayant