Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/295

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du brave général Hartfeld, mort si prématurément et victime de l’unique faute de sa vie : un mariage d’inclination avec une intrigante française qui l’avait conduit au tombeau.

Cette dernière flèche s’émoussa sur l’épiderme de Michelle qui, à présent, respirait l’air natal et se sentait sous la protection des lois de son pays.

Elle s’en alla droit chez sa mère, prévenue par lettre de son malheur, mais elle trouva la pauvre Mme Carlet plus affaiblie moralement que jamais et très occupée de la pensée de ses toilettes de deuil.

« Songes-tu, dit-elle à sa fille, après les premiers mots de bienvenue, porter du crêpe tout l’été ! Où comptes-tu descendre ? Je ne puis te loger, j’ai si peu de place.

— Rassurez-vous, ma mère, je viens comme je le dois vous faire ma première visite, je vous demanderai aussi pour cette nuit de permettre à mon fils de dormir sur ce canapé et à moi sur ce fauteuil ; demain matin, je me pourvoirai. »

La conversation continua puérile jusqu’à l’heure du sommeil et dès la première heure, le lendemain, Michelle, son enfant par la main, sortit pour aller où elle savait trouver un conseil sérieux :

« L’abbé Rozel ? demanda-t-elle au suisse de garde à la porte de la sacristie de Saint-Philippe du Roule.

M. l’abbé est chez lui. Madame sait qu’il demeure avec sa sœur, 166, faubourg Saint-Honoré. »

La mère et l’enfant firent une courte prière à l’autel privilégié de la Vierge et remontèrent un peu le faubourg jusqu’au numéro indiqué. Un long message que Michelle avait envoyé de Belfort à son vieil ami l’avait mis au courant de ses tristes affaires. Il vint vers elle les deux mains tendues :