Page:Gourmont - La Culture des idées, 1900, 2e éd.djvu/228

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ciaux qui affichent une plus grande sévérité de mœurs sont précisément ceux qui sont ravagés ou par les perversions ou, ce qui est beaucoup plus fréquent, par ce que les théologiens appellent doucement mollities. Il sera plus à propos de rechercher d’où vient la férocité du moralisme moderne contre l’amour, et d’abord, car elle n’est le reflet du sentiment public, à quelle cause on peut faire remonter l’origine de cet état d’esprit.

Pour les pères de l’Église, il n’y a pas de milieu entre la virginité et la débauche ; et le mariage n’est qu’un remedium amoris accordé par la bonté de Dieu à la turpitude humaine. Saint Paul parle de l’amour avec le même mépris matérialiste que Spinoza. Ces deux illustres Juifs ont la même âme. « Amor est titillatio quaedam concomitante idea causae externae, » dit Spinoza. Saint Paul avait désigné d’avance le philactère à cette démangeaison, le mariage. Il ne le concède que comme antidote au libertinage ; à la débauche, δια δε ταδ πορνειας, mot que le latin ecclésiastique fornicatio ne rend que d’une façon équivoque. πορνεια entraîne au contraire l’idée de prostitution, et, en somme, son édifiant conseil se traduisait en français vulgaire : mariez-vous ; cela vaut mieux que d’aller voir les