Page:Gourmont - La Culture des idées, 1900, 2e éd.djvu/260

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larité d’un tel cynisme doublera votre réputation, si vous en avez déjà, et, si vous êtes encore inconnu, suffira à vous mettre en bon rang parmi les curiosités littéraires.

Dans le cas où vous auriez vraiment ce goût à la mode, je vous conseillerais au contraire une certaine réserve. Un homme soupçonné de mauvaises mœurs est incontestablement plus estimé qu’un homme convaincu de mauvaises mœurs ; la possibilité d’actes très malpropres excite l’imagination d’une quantité de personnes retenues seulement par la prudence ou par la lâcheté ; mais, s’il est avéré que les actes ont été perpétrés, les désirs reculent devant une certitude trop brutale. Je crois que tel est le mécanisme de ce singulier revirement, et je vous engage à la prudence. D’ailleurs, il est toujours bon de feindre : ainsi on ménage sa propre nature et on se réserve, en cas d’accident, la suprême ressource de la sincérité.


                                   XI

Soyez sans pitié, mais n’en laissez rien paraître. Un louis donné à propos vous fera passer pour un bon camarade, pour un homme dont il