Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/106

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dre lueur. La certitude a sa beauté ; l’inquiétude n’est pas laide. Elle est le signe d’une intelligence particulière, celle de l’abeille quêteuse, en opposition à celle de l’abeille maçonne.

M. Mauclair est supérieurement intelligent. Il n’y a pas d’idées qu’il ne puisse comprendre et s’assimiler aussitôt ; il les revêt immédiatement avec une élégance suprême ; elles semblent toutes mesurées à sa taille : il y a là un sortilège singulier ; on dirait qu’il possède, comme la marraine de Cendrillon, le don de transformer les choses en objets immédiatement utilisables ; il a touché à tout et tiré parti de tout ce qu’il a touché.

Son intelligence est pure ; cela veut dire qu’elle n’est pas sensualiste et que la définition de Locke ne lui est pas applicable. Loin que les idées lui entrent uniquement par les sens, il semble au contraire que les sens n’aient qu’un rôle mineur dans leur élaboration. Il les reçoit à l’état de boutures plus souvent qu’à l’état de graines : mais comme le terreau est excellent, elles reprennent, elles verdoient, elles fructifient. Il fait en ses mois d’août d’abondantes cueillaisons.

Je suppose que, moins influencé par la vie que par la pensée, il réfléchit plus volontiers sur une