Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/108

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Il faut beaucoup de subtilité et de magnifiques ressources logiques pour vaincre l’entêtement des mots, pour les agenouiller dans une posture humble, quand ils sont orgueilleux, gracieuse, quand ils sont laids. D’une telle lutte M. Mauclair sort toujours vainqueur, et on le vit forcer le symbolisme à ne plus être qu’un système d’allusions, un pont de lianes jeté au-dessus de rien pour relier l’abstrait au concret. Ce pont de lianes, c’est une des méthodes préférées de M. Mauclair dans sa dialectique ; il cherche toujours et réussit toujours à relier ensemble un mot connu et une signification inusitée ; mais le pont ne chevauche pas le néant ; il passe hardi et svelte au-dessus du fleuve des idées qui bouillonnent au fond du précipice. Penché sur le parapet, M. Mauclair regarde et songe.

Il songe que de la luxure qui est un péché, parce qu’elle est une diminution, on peut faire une vertu, peut-être une religion (ce qui serait moins neuf), ou, selon une courbure un peu forte des significations, un art : « Elle est l’ancienne joie de l’humanité et elle participe de l’art et de notre désir de ce qui est caché. » Ici, la jonction a lieu entre deux idées, l’idée de jouissance physique, presque impersonnelle à force d’être animale,