Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/149

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au dimanche ivre d’eau-de-vie,


semble songer à une communion avec les puissances invisibles et belles. Qui sait,


car nous avons beaucoup voyagé, Théophile,
par les cœurs des hommes qui sont aussi des villes,


ce qu’il y a au fond des hommes muets et l’obscure chanson chantée en ces âmes qui sont tout de même des églises ? Cette obscure chanson, M. Elskamp la devine et la transpose, sous la protection de Saint-Jean-des-Harmonies ; il est tout musique, tout rythme ; on dirait ses vers presque toujours modelés sur un air ; parfois trop sévèrement, car poésie et musique c’est très différent, et il en résulte que le poète sacrifie la poésie à la musique, la langue au rythme, le mot à la mélodie. C’est un défaut assez fréquent dans les anciennes proses latines où le rythme et la rime riche empiètent sur le sens. Il ne faut pas chercher la beauté d’un vers en dehors de l’accord des mots et des significations ; le vers a naturellement une tendance à trahir la pensée : l’obscurité, si elle n’est pas volontaire, est une défaillance.

Il y a des traces d’obscurité spontanée dans la poésie de Max Elskamp et aussi des traces de pré-