Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/210

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nerfs sensibles et quelques veines prêtes à se gonfler par le désir, la colère ou l’amour. Cela nous est d’ailleurs certifié par la tendresse mélancolique du poème qui scelle les Vergers illusoires :


J’entre dans le verger natal loin des allées
Qui conduisent aux bassins des rêves trompeurs
Par la clairière où l’air s’adoucit des vapeurs
Odorantes de buissons fleuris d’azalées…


Les joies qu’il n’a pas trouvées dans le monde extérieur, il les implore avec certitudes du bercail dont la porte ouverte attendit longtemps, et non pas en vain, l’aventurier. C’est assez bien le thème de l’Enfant Prodigue. Alors le poète entre dans le calme définitif où sa nature doit se plaire et où elle se prélasse avec un peu de complaisance.

Les vers de M. Fontainas ont certainement été écrits dans une oasis. Travaillés avec méthode, ils apparaissent comme des bronzes bien ciselés, débarrassés de toute mousse et de toute bavure : ainsi ils ont acquis une grande pureté de profil ; les lignes sont nettes, les surfaces, harmonieuses, les contours, dégagés ; l’ensemble est solide, sérieux et d’aplomb. Si les poèmes ordonnés avec de tels vers manquent presque toujours de fantaisie