Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/294

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a endossé la foi comme un vêtement ; il s’est orné de superstitions comme de breloques. Il vante le pouvoir miraculeux de la langue de M. Olier conservée dans un bocal à Saint-Sulpice. On dirait qu’il veut décourager l’intelligence, mais il n’a vraiment qu’un dessein : étaler sa foi comme les lessiveuses étalent du linge sur une haie. Il étale toute sa foi, toute la lessive et jusqu’aux linges les plus troués et les plus tachés. Il est fier de sa foi et de son ignorance, et de sa crédulité, et de ses chiffons mal blanchis. Il voudrait que l’Église lui ordonnât des croyances et des étalages plus humiliants. Ayant baisé les sandales de Labre, la redingote de M. Dupont et la calotte de M. Vianey, il souhaiterait de plus répugnantes joies : par un côté, la vénération des reliques se rapproche des divagations sensuelles. Il y a des baisers qui ne sont sensuels que parce qu’ils sont sales ; il y a des reliques qui ne sont saintes que parce qu’elles sont malpropres.

Mais le croyant est humble. La pure cendre des palmes n’a taché son front que d’un signe symbolique ; il lui faut de la vraie poussière, celles des sentiers où des sueurs ont suinté, celles des dalles où des femmes accroupies ont laissé l’odeur