Page:Gourmont - Le Livre des masques, 1921.djvu/145

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ou quatre maîtres que je n’ai pas à juger ici) est tombé plus bas que jamais depuis un siècle et demi qu’il fut importé d’Angleterre. Négligeant l’observation et le style, dépourvus d’imagination, de fantaisie et surtout d’idées, tant générales que particulières, les façonniers qui assument le métier de narrer des histoires ont déconsidéré la fiction au point qu’un homme intelligent, soucieux de loisirs dignes de son intelligence, n’ose plus ouvrir un de ces tomes et que les quais eux-mêmes se révoltent et s’endiguent contre le flot jaune. M. Paul Adam a certainement souffert de cette crise de mépris : des lettrés mal informés ont cru longtemps que ses romans étaient pareils à tous les autres. Ils en sont très différents.

D’abord par le style : M. Paul Adam use d’une langue vigoureuse, serrée, pleine d’images, neuve jusqu’à inaugurer des formes syntaxiques. Par l’observation : son regard aigu pénètre comme un dard de guêpe dans les choses et dans les âmes ; il lit, comme la photographie nouvelle, à travers les chairs et à travers les coffrets. Par l’imagination qui lui permet d’évoquer et de faire vivre les êtres les plus