Page:Gourmont - Le Livre des masques, 1921.djvu/165

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tard, baroque et blagueur, d’un mauvais goût impudent, et d’à-coups de génie ; il a l’air ivre, mais il n’est que laborieusement maladroit ; il taille, pour en faire d’absurdes chapelets, de miraculeux cailloux roulés, œuvres d’une patience séculaire, mais aux dizaines, il laisse la petite pierre de mer toute brute et toute nue, parce qu’il aime la mer, au fond, avec une grande naïveté et parce que sa folie du paradoxal le cède, de temps en temps, à une ivresse de poésie et de beauté.

Parmi les vers jamais ordinaires des Amours jaunes, il y en a beaucoup de très déplaisants et beaucoup d’admirables, mais admirables avec un air si équivoque, si spécieux, qu’on ne les goûte pas toujours à une première rencontre ; ensuite on juge que Tristan Corbière est, comme Laforgue, un peu son disciple, l’un de ces talents inclassables et indéniables qui sont dans l’histoire des littératures, d’étranges et précieuses exceptions, — singulières même en une galerie de singularités.

Voici de Tristan Corbière deux petits poèmes oubliés même par le dernier éditeur des Amours jaunes :