Page:Gourmont - Le Livre des masques, 1921.djvu/36

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mes, des Êtres libres et si fiers qu’ils n’admettront d’autres jugements que les jugements de Dieu ? M. Maeterlinck aperçoit cette aurore, parce qu’il regarde en lui-même et qu’il est lui-même une aurore, mais s’il regardait l’humanité extérieure, il ne verrait que l’immonde appétit socialiste des anges et des étables. Les humbles, pour qui il a écrit divinement, ne liront pas son livre, et s’ils le lisaient, ils n’y verraient qu’une dérision, car ils ont appris que l’idéal est une mangeoire et ils savent que s’ils levaient les yeux vers Dieu, leurs maîtres les fouetteraient.

Ainsi le Trésor des Humbles, ce livre d’amour et de libération, me fait songer avec amertume à la misérable condition de l’homme d’aujourd’hui — et sans doute de tous les temps possibles,


Magnifique mais qui sans espoir se délivre
Pour n’avoir pas chanté la région où vivre
Quand du stérile hiver a resplendi l’ennui.


Et ce sera en vain que


Tout son col secouera cette blanche agonie,


l’heure de la délivrance sera passée et quelques-uns seulement l’auront entendue sonner.