Page:Gourmont - Le Livre des masques, 1921.djvu/83

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des mers ; et elle parle : Poète qui promènes parmi la vie ton étonnement et tes désirs et tes amours, tu te présentes ému par les seules joies chamelles et tu souffres, car ces joies, tu ne les sens vraiment que vaines, mais


Si tu n’étreins que des chimères, si tu bois
L’enivrement de vins illusoires, qu’importe !
Le soleil meurt, la foule imaginaire est morte
Mais le monde subsiste en ta seule âme : vois !
Les jours se sont fanés comme des roses brèves,
Mais ton Verbe a crée le mirage où tu vis…


et ma beauté, c’est toi qui lui donnes sa forme et son geste ; je suis ton œuvre ; j’existe parce que tu me penses et parce que tu m’évoques.

Telle est l’idée maîtresse de cette Gloire du Verbe, l’un des rares poèmes de ce temps où l’idée et le mot marchent d’accord en harmonieux rythme.

Au lever du soleil la galère remit à la voile : Pierre Quillard partait pour des pays lointains.

C’est une âme païenne ou qui se voudrait païenne, car si ses yeux cherchent avidement la beauté sensible, son rêve s’attarde à vouloir forcer la porte derrière laquelle dort obscurément la beauté enclose dans les choses. Il est