Page:Gourmont - Le Puits de la vérité, 1922.djvu/18

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autre fois de l’enterrer, ce qui serait bien extraordinaire de la part d’un monstre animal. Bien plus, si l’on peut dire, les témoignages s’accordent pour lui reconnaître le don de la parole ! Tout cela et bien d’autres choses encore, quoiqu’on ne puisse pas se fier absolument aux racontars de paysans affolés, ont fait supposer à M. Puech que la bête n’était autre chose qu’un fou sadique qui errait dans les campagnes et terrorisait les habitants. Les malheureux paysans n’eurent jamais l’idée qu’il pût exister un homme capable de tant de crimes et aussi hideux ; de là, la légende de la Bête, qui avait au moins l’avantage de justifier l’humanité. Le fou, qui en dehors de ses crises, était peut-être inoffensif, ne fut jamais soupçonné. Le résultat fut qu’il périt sans doute beaucoup d’humains, mais moins qu’on ne l’a dit, et que la contrée fut entièrement purgée des loups, auxquels on fit furieusement la chasse, et qui disparurent. Les animaux avaient payé pour l’homme.


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