Page:Gourmont - Lettres à Sixtine, 1921.djvu/96

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Des fleurs toutes rouges, toutes parfumées, pour que l’essence de leur odeur nous grise en des rêves d’amour.

Elle a des gouttes blondes, distillées au long de sa tige, des gouttes blondes dont le baume cicatrise les blessures de nos cœurs.

Notre joie, nous l’avons plantée en un coin dérobé du monde, et arrosée de nos larmes d’amour, et ensoleillée de nos sourires d’amour.

La jeunesse de notre joie a poussé verdoyante.

Ses feuilles pendant le jour ont poussé, et pendant la nuit, ses fleurs.

Longtemps, chétive, et douteuse à la vie, elle lutta, guettée par la mort.

La mort qui dessèche les plantes et les cœurs, les rêves et les feuilles, les âmes et les fleurs.

Guettée par la mort, elle est entrée dans la vie, car nous l’avons arrosée de nos larmes d’amour, et ensoleillée de nos sourires d’amour.