Page:Gourmont - Muses d’aujourd’hui, 1910, 3e éd.djvu/54

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N’est que ce dur besoin qui m’afflige et m’oppresse
De vivre en Orient !…

Le dernier recueil de Mme de Noailles : les Éblouissements, marque peut-être une plus sûre maîtrise dans l’art des vers. Dans le Cœur innombrable, son premier volume, la poétesse ne développait pas ses motifs, et personnellement j’aime la concision de ces notations, j’aime ces émotions emprisonnées dans un vers comme une fougère sous la glace de l’hiver. Mais la poésie, qui est le jeu suprême du langage, ne doit sans doute pas dédaigner les développements verbaux ; il faut que la parole rebondisse et trouve ses accords. Exiger trop de précision, c’est peut-être ne pas comprendre le jeu verbal qu’est avant tout la poésie. La poésie, comme tout ce qu’on appelle art, est un rythme qui recrée de la vie. Nos peintres veulent laisser sur leurs toiles la lumière qui les a éblouis, les poètes