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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér1, 1922.djvu/198

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duré. M. Henri de Régnier était un décadent, et aussi M. Jean Moréas, et décadents leurs maîtres, Verlaine et Mallarmé.

Eux-mêmes, il faut bien le reconnaître, se considéraient comme tels ; l’on eût sans doute fâché M. de Régnier en lui prédisant qu’il serait tenu, quelques années plus tard, pour un des plus vrais représentants de notre tradition littéraire, un de ceux qui, à travers les romantiques, rejoignent directement les poètes de la plus belle époque française. Mais M. Moréas, en ce temps-là, se croyait encore bien plus décadent que M. de Régnier. Il était, après Verlaine, le décadent type, le décadent intransigeant, et il écrivait, en collaboration avec M. Paul Adam, un volume absurde, le Thé chez Miranda, dont la folie étonne également aujourd’hui et ceux qui le composèrent, et ceux qui l’admiraient.

Ces débuts tumultueux et incohérents font penser à la silencieuse jeunesse de Flaubert. Lui aussi il écrivit des proses et même des vers bien dignes d’être appelés décadents ; mais il se garda de les publier : sa première œuvre fut une œuvre maîtresse. Quelques-uns des anciens décadents ont donné, en ces dernières années, des livres d’une