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droguet, — O ma belle lande, grande comme la mer, — O ma Grand’Lande de Lessay ! »

Quant au patois, deux vers suffiront pour montrer qu’il ne se différencie guère du français que par la prononciation :

L’Boun-Guieu t’a byi’n minse à ta pièche,
Lainde, paôsae là comme un mù...


Cependant, il a ses mots particuliers, comme vyipaer, viper, pour dire le sifflement ou plutôt le fouettement du vent, et qui se rattache à l’anglais whip. Barbey d’Aurevilly admirait beaucoup ce mot, qui en effet manque à la langue française. Le patois du Cotentin est très voisin du dialecte qu’écrivait Robert Wace au douzième siècle, et il n’est pas inutile de le connaître pour bien comprendre ses poèmes historiques.

« Des flèches plus épaisses volaient que pluie par vent, dit Wace, racontant la bataille de Hastings, très épaisses volaient les flèches qu’Anglais appelaient vibettes. »

Mult espés voloënt saiettes
Que Engleis clamoënt wibetes...


C’est-à-dire : mouches. Dans le patois du Cotentin, vibet signifie moucheron.