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Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér3, 1924.djvu/77

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un tour de main, sans que le sourire ait quitté ses lèvres amènes. Car il a le sourire, tout comme la Joconde, ce grand prêtre, et il murmure, tout en essuyant à son étole le couteau du sacrifice : « Ce n’était pas plus difficile que cela ! »

M. Faguet est bon enfant, mais trop modeste. Ce qu’il a fait est très difficile et, certes, je ne m’en chargerais pas. Il a, dans l’œuvre d’Alfred de Musset, taillé un volume, mi-prose, mi-vers, destiné à l’édification littéraire, morale et sociale des familles pieuses. « J’y ai mis tous mes soins, dit-il, et je souhaite avoir réussi. » Il a réussi. Cette œuvre hardie m’inspirait une vive curiosité. A peine était-elle en vente que je m’empressais de l’acquérir. Les occasions de se divertir sont rares et l’on ne vous offre pas tous les jours un « Musset des Familles ». Quand Ninette ou Ninon se taillent une robe, il tombe des rognures. M. Faguet a recueilli ces rognures, les a classées, étiquetées avec soin. On connaît la provenance de chaque morceau d’étoffe. Ceci vient de l’épaule et ceci de la gorge, et ceci de la manche et ceci de la jupe. Voici, jeunes filles, un peu de Mardoche et un peu de Namouna. Par ce que nous vous donnons, jugez de ce qui manque. Voulez-vous des précisions ? Lisez l’étiquette : Namouna est l’histoire d’un jeune pacha quelconque qui habite quelque part en Orient et qui a un