Page:Gourmont - Sixtine, 1923.djvu/198

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— Oh ! non, répliqua Oury, c’est impossible. Pas avant quatre heures.

Assez attristé, Entragues s’éloigna, continuant sa promenade, cherchant parmi les crânes penchés une chevelure familière à ses yeux. Vaine enquête ; alors, il sortit seul, sans le compagnon qu’il aurait voulu et remonta la rue jusqu’au boulevard.

Aux confidences de ce triste malade, jadis un intelligent garçon, destiné, pensaient ses amis, à rédiger d’intéressante critique rétrospective, une sorte d’histoire de la pléiade, moins puérile et plus brave que celle du dolent Sainte-Beuve, Entragues eut peur de s’anonchalir. Ces maladies de la volonté étaient contagieuses : il décida de fuir cet intellectuel lépreux et d’abolir, d’abord, en lui-même, tout souvenir de la rencontre. Un pareil mal pouvait surprendre ses nerfs et coucher sa volonté dans l’ornière de l’habitude ; il ne se souciait pas d’un séjour, ni même d’une excursion de touriste, aux frontières de la folie.

Il flâna de divers côtés, en des bureaux de rédaction, à la recherche de Van Baël, qu’il voulait consulter sur un détail de costume, passa une demi-heure à la Salle des ventes où il acheta quelques soies anciennes et un lot d’ornements d’église fanés, laids, mais sacrés et sentant la simonie.

Un prêtre simoniaque, depuis des années, le hantait : c’était une face maigre avec des yeux haineux, un corps violemment ossaturé, rigide, des mains longues, des mains blanches, des mains souples aux ongles carrés, des mains de vendeur d’étoffes, des mains de bénisseur, des mains de juif vite rentrées