Page:Gourmont - Sixtine, 1923.djvu/310

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pria, me menaça, se fit esclave et chien : je fus sourde. Nous luttâmes maintes fois, mais j’avais avec la force de mes poignets, qui sont de fer, la force de ma volonté, qui est d’acier, et je le couchais à mes pieds et je le piétinais et je crachais sur son sexe. Cela dura une année, une longue et odieuse année.

Enfin, à l’anniversaire du premier refus, avec des larmes d’amour dans la voix, mais un certain calme assez noble, il me supplia encore, un revolver tourné vers sa poitrine : « — Non, jamais ! » Il tomba, et je compris que ce n’était pas sa faute.

Vous trouverez la suite dans vos souvenirs :

Résolution de ne plus jamais choisir ; résolution, en une seconde et telle occurrence, de me sacrifier, moi, en expiation du premier meurtre. Sur ces deux points, nous avons, je pense, épilogué jadis.

Voilà tout le poison que je versai, d’une inconsciente main.

(Ah ! un jour vous m’avez bien refroidie, en hésitant à me garantir mon lendemain. Un oui net et spontané me jetait en vos bras immédiatement.)

Samedi.

Voici la légende de la chambre au portrait : « Tout homme qui couche dans cette chambre voit, au cours de la première nuit, la vieille glace verdie lui refléter le portrait de celle qu’il doit aimer. Il n’est mariage, il n’est fiançailles, il n’est liaison, il n’est serments qui tiennent : la magique image s’impose et c’est comme un envoûtement. »

Pouvais-je vous dire cela, même en riant ?