Page:Gourmont - Une nuit au Luxembourg, 1906.djvu/82

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l’empire da monde, et l’homme, une de leurs proies. Mais vous avez trouvé l’art du feu et vous vous êtes élevés au-dessus de tous les autres animaux. Le feu, qui vous donna un été constant, vous donna aussi le loisir. De là vos civilisations, filles orgueilleuses de la paresse, et qui renient leur mère. C’est de la paresse que tout est né parmi les hommes. De l’année où un de vos ancêtres a pu passer l’hiver au coin de son feu datent les arts, les sciences, les jeux, l’amour, toutes les joies. Le loisir, voilà la plus grande et la plus belle conquête de l’homme. Mais si vous avez su conquérir, si vous avez su créer, vous n’avez presque jamais su utiliser vos conquêtes ou vos créations. Ayant conquis le loisir, vous l’avez dédaigné, et des esclaves, honteux de l’inactivité de leurs mains domestiquées, se sont mis à prêcher parmi vous la sainteté du