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LIVRE SECOND.

LIVRE SECOND.
Glauque s’offre à fes yeux, Medonte fe prefante,
Les trois fils d’Antenor l’enuironnent de prez,
Polybete les fuyt & Therfiloque apres.
Idée accourt auffi le charton Priamide,
Dont l’vne & l’autre main tient fon dard & fa guide.
Voicy de toutes parts ce nombreux efcadron,
Enueloppefes flancs & bruit à l’enuiron :
Et non content apres d’auoir veu ce vifage,
Il veut reuoir cent fois les traits de fon image :
S’empreffe pour le fuiure, & defire eftre inftruit.
Du fuiet qui l’ameine aux Regnes de la nuict.
Tandis la fleur des Grecs, la Phalange Argolique,
Sent qu’vne afpre frayeur foudainement la pique :
Voyant ce grand Heros & l’efclair de l’acier
Flamber au fil du glaiue & fur le haut cimier.. 11
Vne part de la bande aux routes prompte & duicte,
Comme iadis aux nefs dans la nuit prend la fuite :
L’autre veut s’efcrier fa voix grefle hauffant,
Qui beante d’effroy trompefon foible accent.
Il parle à ces Eſprits quand l’horreur non preueue,
Du vaillant Deiphobe a diuerty fa veuë,
Ce fils du bon Priam rapporte fur fon corps,
De la rage & du fer les extremes efforts.
Ses deux bras font coupez, l’honneur de fon viſage
Eft defolé par tout d’vn horrible carnage :
Il ale nez fanglant honteufement tranché,
Son ceil qui fut fi beau du cerne eft arraché,
L’oreille gauche, & droite eft tronquée &fanglante, ,
Et la léure à lambeaux fur le menton pendante.
A peine le Troyen recognoift fon amy,
Qui honteux & tremblant ne paroift qu’à demy,
Cachant fon chef affreux derrière ces idoles :
Et d’vne voix cogneuë il luy dit ces parolles.
Genereux Deiphobe, illuftre fang de Roy,
Quelle horrible vangeance a-ton prife de toy ?
Quel bras affez puiffant d’vn cruel aduerfaire,
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