Page:Gozlan - Le Dragon rouge, 1859.djvu/194

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
191
le dragon rouge.

autre cause de joie qu’un mariage, quand on se marie tant sur la terre, Casimire se sentit changée ; elle fut comme métamorphosée dans ce pays des vieilles métamorphoses païennes. Au milieu de la nuit, entre deux danses animées, elle détacha son collier d’or et l’attacha au cou de la jolie mariée. Cette générosité inouïe, ce magnifique présent exalta toutes ces têtes italiennes déjà si échauffées par l’ivresse du bal.

On couronna Casimire de deux rameaux de myrte, et les poètes de la vallée improvisèrent, dans la sérénité de la nuit, des vers sur sa beauté, sur sa jeunesse, sur la gloire de son mari. Enfin elle partagea les honneurs de la fille de la maison, de la mariée. Celle-ci était avide de prouver sa reconnaissance ; elle s’inquiétait de payer à sa manière une partie du riche cadeau qu’elle avait reçu de Casimire. Elle dit quelques mots à l’oreille de ses amies ; son mari les confia avec le même mystère aux parents de son beau-père, et un projet fut arrêté entre eux.

À deux heures après minuit, quand la nuit se faisait plus fraîche, et que les enfants s’endormaient, les mains pleines de gâteaux et de fruits, sur les genoux de leur mère, les invités et les invitées prirent les flambeaux de la table, et dirent au commandeur et à Casimire qu’ils allaient avoir l’honneur de les conduire à la chambre qui leur était destinée.

Le commandeur comprit alors, mais trop tard, la faute qu’il avait faite en s’annonçant, lui et Casimire, chez ces bonnes gens, comme le mari et la femme. Mais Casimire l’avait voulu. Il n’était plus temps de revenir sur cette faute. Que d’explications ! pourquoi avoir menti ? La haie d’ailleurs était formée ; le cortège d’honneur les attendait.

Ils marchèrent donc au milieu de la foule qui les accompagna jusqu’à la porte de la ferme. Là, le jeune marié leur dit, d’un accent pénétré de gratitude, qu’il n’avait pas trouvé de meilleur moyen de montrer combien il était sensible à la visite d’hôtes aussi nobles, aussi bons, aussi distingués, que de leur