Page:Gozlan - Le Dragon rouge, 1859.djvu/306

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
303
le dragon rouge.

— Son mal a augmenté depuis votre départ. Le médecin a dit qu’il n’y avait plus d’espoir.

La colère de la marquise tomba tout à coup en apprenant la position désespérée de sa nourrice.

— Conduisez-moi sur-le-champ auprès d’elle, dit-elle.

— Ah ! vous lui ferez bien plaisir, madame la marquise, car elle n’a cessé de vous demander dans son agonie.

— Venez ! venez !

Encore toute parée, tout étincelante, la marquise entra dans la chambre de Marine, s’assit près de son lit, et, lui prenant la main, elle lui dit :

— Me voilà, ma bonne Marine.

— Te voilà, murmura faiblement Marine, en s’efforçant de tourner la tête du côté où était la marquise. Je suis contente que tu sois venue. Je craignais…

— Que craignais-tu ?

— De ne plus te voir. Dieu m’a fait la grâce que je lui demandais.

— Ne t’exagère pas ton mal, ma bonne Marine.

— Tu sais si je suis dure au mal et s’il me fait peur… Je ne passerai pas la nuit. La mort me galope.

— Quelle pensée ! Mais non… tu ne mourras pas ! que deviendrais-je, moi ?

— Pauvre enfant ! J’y songeais. Tes enfants sont partis…

— Hier au soir.

— Moi, je m’en vais aussi.

— Tu vois bien que je ne puis rester seule.

— C’est ce que je me disais, et pourtant, mignonne, je me sens tirer les draps par la Faucheuse.

— Ne me désespère pas. Je vais appeler les meilleurs médecins de Paris ; nous aurons cette nuit même une consultation. Nous te sauverons, puisque tu crois être en danger. Tu seras du moins plus rassurée quand tu connaîtras ton mal.

La marquise se leva.