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La noblesse polonaise fut prévenue que le marquis de Courtenay donnerait un bal historique où l’on ne serait reçu que sous le costume d’un personnage célèbre à quelque titre de l’histoire. C’était là une immense préoccupation jetée en appât à l’oisiveté polonaise, la plus parfaite des univers quand elle n’est pas interrompue par la guerre. Pour la première fois, peut-être, les jeunes seigneurs de Varsovie ouvrirent les annales des peuples, et cela pour y découvrir, non des exemples à suivre, de fortes leçons à méditer, mais des formes d’habits et de cotes de maille à imiter artistiquement. Un mois entier on n’entendit que le cri du velours ou du brocard fendu par les ciseaux. Pendant ce temps la Russie, ouvrière matineuse, s’agrandissait dans tous les sens, grâce à l’activité, à la sagesse, au génie du czar Pierre Ier.
Ce fut une soirée dont le souvenir restera longtemps, celle où les portes de l’hôtel du marquis de Courtenay s’ouvrirent à cette élégante société polonaise, fière et bizarre dans ses fourrures, sous ses colbacs, orientale, scythe et quelque peu française, et qu’on vit monter par des escaliers de marbre, sous des arceaux de feuilles et de fleurs, à travers des nuages de parfums, ces délicieuses jeunes filles polonaises, pétries avec de la neige, des rayons de lune et des feuilles de rose. Si