Page:Gozlan - Les martyrs inconnus, 1866.djvu/33

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— Non, ma chère Valentine, c’est…

— Qu’est-ce donc que ce M. Devismes ?

— C’est un armurier.

— Un armurier !… Ah ! Georges ! Georges !… vous ne m’aimez donc plus, dit Valentine en jetant ses bras autour du marquis de Blancastel, que vous avez une pareille pensée ? Ôtez-la de votre esprit, ne l’exprimez jamais, ou je vous dirai, Georges, ce que je viens de vous dire, que vous ne m’aimez plus.

— Je vous aime plus que jamais, Valentine, et c’est cet amour qui me sauvera.

Un bon et divin sourire courut sur la figure déjà toute pâle et tout effrayée de Valentine.

— Oui, c’est cet amour qui me sauvera. J’ai mal vécu jusqu’ici, ou plutôt je n’ai pas vécu, j’ai brûlé. Sauf cinq belles années données à la guerre, j’ai perdu mon temps, mes revenus, mon intelligence… à quoi ? — Je n’en sais rien ; et, faut-il vous l’avouer ? ces goûts du monde, d’oisiveté, de bruit, de luxe, de plaisir, que j’estime ce qu’ils valent, sont plus forts, plus impérieux que ma volonté.

— Je ne le sais que trop, pensa Valentine.

— Non, la mienne toute seule ne suffit pas pour me