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Page:Gozlan - Les vendanges, 1853.djvu/181

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marchands d’argent, qui à leur tour traitent avec de petits commerçants de rien. Le coupon passe avant tout, il décide de l’emprunt. Que voulez-vous ? le rentier a peur, on l’a effaré.

— Si je ne puis vous céder l’île que vous me demandez en garantie, reprit le prince, j’ai du moins le droit, écoutez-moi bien, en faisant revivre d’anciennes ordonnances, de conférer une vice-royauté héréditaire sur cette colonie. Une vice-royauté ! Mais dans ce cas j’exigerais…

— Dispensez-vous, prince, de me faire une concession dont je ne suis pas digne, et que dans tous les cas je refuserais d’accepter, car les sujets sont trop mal élevés dans ces temps-ci, acheva la banquier en s’inclinant.

La comédie commence, fit-il poliment observer au prince. Daignez-vous l’honorer de votre présence ?

— Cela m’est impossible, je suis attendu à mon ambassade, reprit l’altesse. Nous reprendrons notre entretien un autre jour.

— À vos ordres, prince, dit le banquier en accompagnant respectueusement jusqu’à sa voiture le prince étranger qui l’avait visité incognito.

La voiture du prince sortit d’un côté, le banquier tourna de l’autre après s’être faufilé à travers l’embarras des équipages stationnés dans la cour de son hôtel.

L’omnibus du Roule passait : il y monta et se fit faire une petite place entre un maçon de Neuilly et une nourrice qui se rendait aux Ternes.

— Dans dix minutes je serai chez Reine, pensa-t-il avec joie. Dieu ! que ces princes sont importuns avec leur pau-