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Page:Gozlan - Les vendanges, 1853.djvu/208

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mieux placés n’ont pas meilleur goût que lui. On peut d’ailleurs, sans crime, être préoccupé de l’attrait des décors, lorsqu’il s’agit d’un ballet.

— Oui, ce décor est fort remarquable, reprit-elle ; on ne devine pas comment on parvient à produire tant d’illusion. On croit voir une salle de spectacle au temps de Louis XV. Comme les figures se détachent sans effort du fond des loges et comme les loges sont supérieurement drapées ! On croit même, tant le prestige est poussé loin, continuer cette salle fictive, et participer réellement avec elle à un même spectacle.

Dauphin avait écouté, la bouche ouverte, le visage plein d’une perplexité à la fois respectueuse et comique, les paroles qu’avait dites madame Ervasy.

— Comme il me regarde d’un air singulier, pensa-t-elle. Ne m’aurait-il pas comprise ? me serais-je servie d’expressions trop recherchées ? c’est peut-être cela. Voyons. Et madame Ervasy répéta aussi simplement que possible l’éloge qu’elle avait donné au décor du troisième acte du Diable boiteux, décor admirable qui offre, comme chacun sait, la peinture exacte d’une salle de spectacle de l’ancien temps, garnie à toutes les places de personnes attentives à suivre la représentation d’un ballet. Elle ne fut pas plus intelligible cette seconde fois que la première. Le visage du chasseur ne se détendit pas. Dauphin n’avait pas compris.

— Madame, répondit-il cependant, me fait l’honneur de me parler d’une chose dont je n’ai pas connaissance. Je n’ai pas vu ce décor, qui doit être magnifique, puisque c’est l’avis de madame. Celui qui m’a paru si beau me représentait au naturel un endroit singulier, où il y a des lumières et pas de lustres.