vent à supporter la mauvaise humeur de monsieur, il a un caractère incompréhensible. Il gronde pour rien, il est toujours malade, change de volonté à chaque instant, fait atteler et dételer dans la même minute ; il nous oblige à l’attendre quelquefois jusqu’à deux heures après minuit.
— Ces caprices sont fort excusables dans un homme malade, interrompit le prince ; mais madame ne vous donne aucun sujet de plainte.
— Madame à aussi ses lunes.
— Caprices charmants, légers, dit le prince, caprices d’une femme adorée de son mari.
— Je ne sais pas s’il l’adore la nuit, pour ne parler que de ce que je connais, répliqua le chasseur, mais le jour il ne fait guère attention à elle.
— La plupart des ménages parisiens en sont là, monsieur Dauphin, dit le prince ; d’ailleurs madame a des goûts que M. Ervasy n’a pas le temps de partager. Rendre des visites, recevoir, aller au bal, au spectacle.
— Madame, c’est un fait, continua Dauphin, aime beaucoup le spectacle, je le sais, moi qui l’accompagne toujours.
— Vous plaindrez-vous encore de cela ? Voyons, monsieur Dauphin.
— Ce n’est pas pour me plaindre que je le dis, monseigneur.
— Vous seriez fort injuste, convenez-en.
— D’autant plus, ajouta l’interlocuteur du prince, que madame me fait quelquefois l’honneur de me parler au spectacle ; elle me demande mon avis sur telle pièce, sur tel acteur.