Page:Gozlan - Les vendanges, 1853.djvu/72

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brûlés. On se souvient de pareil service ; je compte donc sur vos bons procédés pour Fournisseaux, qui sera toujours un lion pour la défense de vos intérêts. J’ai pour habitude, tu le sais, Lucette, de l’inviter à ma table le jour de Pâques, et le soir de Noël ; mon père en usait ainsi envers ses commis, quand ils avaient plusieurs années de service.

Le ton de profonde honnêteté avec lequel M. Richomme s’abandonnait à ces recommandations cordiales avec ses enfants, toucha et attendrit Lucette, sa charmante fille. Elle s’enlaça au cou de son père et l’embrassa avec force.

— Ah ça ! s’écria tout à coup une voix du fond d’une alcôve, voudras-tu bientôt te coucher, monsieur Richomme, j’ai les pieds glacés ?

— On obéit, madame Richomme, répondit le droguiste en se levant. Il dit bonsoir à sa fille par un gros baiser sur les deux joues, et il serra la main à son gendre.


II

Qui ne devinera la fin d’une soirée de dimanche, passée en famille, à cette causerie bourgeoise, auprès du feu, entre onze heures et minuit ? La maison Richomme avait reçu, et tout l’attestait dans la chambre de réunion. La disposition des chaises indiquait encore les petites agrégations qui s’étaient formées autour des tables d’écarté. On eût dit, aisément le sujet des conversations ou des petits jeux, rien qu’à examiner la position respective des siéges. Ici un cercle indiquait qu’on avait joué au furet, là un fau-