Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/140

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à notre avis, les sentiments de Mme de Maintenon. Il serait difficile de prétendre qu’elle ait vu sans satisfaction une entreprise qui avait pour objet de convertir les hérétiques : elle était aussi enracinée dans sa foi nouvelle qu’elle avait eu de peine à se détacher de l’ancienne. Mais ce n’est pas une raison pour mettre à sa charge les « extrémités déplorables » qui suivirent l’acte de 1685. « L’on est bien injuste de m’attribuer tous ces malheurs, écrivait-elle : s’il était vrai que je me mêlasse de tout, on devrait bien aussi m’attribuer quelques bons conseils. Il y a quinze mois que je suis en faveur ; je n’ai jamais nui à personne. Je gémis des vexations qu’on fait : mais, pour peu que j’ouvrisse la bouche pour m’en plaindre, mes ennemis m’accuseraient encore d’être protestante, et tout le bien que je pourrais faire serait anéanti. » Louis XIV ne se plaignait-il pas qu’elle ne fût point « assez animée contre ses coreligionnaires » ? Ce qu’elle demandait, c’était qu’il fût fait usage avant tout des moyens qu’offrait l’éducation pour « ramener les consciences égarées. » On ne peut donc lui refuser ce témoignage, qu’elle avait mis du côté de l’humanité son cœur et sa raison. On voudrait seulement que, moins préoccupée de sa situation personnelle et assurée d’ailleurs de son crédit, la petite-fille d’Agrippa eût protesté plus hautement contre les violences ; on voudrait surtout que, dans la conversion à laquelle elle soumit les enfants de sa tante de prédilection, Mme de Villette, elle se fût souvenue davantage de ses propres angoisses et des sacrifices qui lui avaient été imposés.

Si l’influence générale qu’elle exerça sur les mœurs de la cour et du roi s’inspira trop souvent du même esprit